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L'AFFAIRE DES NEUFS DISPARUS DE BEPANDA

Hugues Seumo, Camer.be 29/04/2008 L’affaire des neuf disparus de Bépanda hante toujours les familles des victimes. Les responsables du C9 n'ont aucune intention de rester indifférents face à l'injustice et les crimes crapuleux qui continuent à être perpétrés en toute impunité par les autorités Camerounaises. Le C9 sortira une fois de plus des casernes pour une autre action internationale. Camer.be en a profité pour rencontrer Monsieur Bethuel Kouatou, l’un des pères fondateurs du C9. Confidences...

L’affaire des 9 disparus de Bepanda a été diffusée  récemment sur France 5. Comment avez vous apprécié ce chef d’œuvre ?
Apres avoir visionné le documentaire réalisé par Osvalde LEWAT sur l’affaire des 9 disparus de  Bépanda et sur le commandement opérationnel dans sa globalité, je dois avouer que j’ai été surpris par la qualité des interventions mais surtout des recherches effectuées par la réalisatrice, preuve que lorsqu’il y a de la volonté le résultat peut suivre.
Avez vous été approché de près ou de loin dans ce projet ? Si oui, quelles ont été vos contributions  ?
J’ai tout récemment contacté Mme LEWAT peu avant la première diffusion du documentaire pour lui faire-part de ma volonté de participer à cet ouvrage. Elle m’a  fait savoir qu’elle avait essayé de me joindre sans succès et avait personnellement contacté ma sœur cadette pour obtenir mon contact . Elle a été  heurtée à un refus de celle-ci. Pour comprendre cette malheureuse circonstance, il faut revenir sur le contexte qui prévalait dans ma famille  jusqu’en 2003. En fait depuis la disparition de mes deux frères cadets dans des circonstances dramatiques non encore élucidées, mes parents et moi soutenus par M. Anicet EKANE et bien d’autres avions décidés de chercher à comprendre  ce qui s’était passé, ce qui a conduit à l’organisation des grandes marches de protestation à Bépanda. Nous avons été l’objet de graves menaces de la part gouvernement camerounais qui nous reprochait les recherches et la publicité que nous orchestrions autour de ce cas des 9 disparus qui n’étaient qu’une poignée comparée  aux milliers d’autres assassinés dans des circonstances similaires. Et donc dans ce contexte particulier, d’un commun accord avec les membres de ma famille, décision avait été prise de ne faire aucune déclaration  dans le souci de faire retomber la pression sur moi en temps que président et porte-parole du C9. Je regrette sincèrement n’y avoir pas participé. Je contacterai Mme LEWAT en temps opportun pour la réalisation d’un autre documentaire essentiellement consacré à l’affaire des 9 de Bépanda.
En tant qu'initiateur de la grande campagne de revendication après la disparition de vos deux cadets Charles et Elysée Kouatou avec 7 de leurs camarades. Quelles ont été les retombées de cette mobilisation ?
La mobilisation autour de cette affaire de Bépanda a eu des retombées largement au dessus de nos estimations. La première et la plus importante à mon avis a été le démantèlement du  Commandement opérationnel, le limogeage du gouverneur de la province du littoral, le limogeage du général MPAY, et non des moindres, l’arrestation et l’incarcération de plusieurs officiers supérieurs. Pour la première fois des hauts gradés de l’armée passaient des mois en cellule et devaient être entendus pour des faits qui leurs étaient reprochés. Il faut aussi souligner le soutien inestimable  des ONG à l’extérieur du pays qui ont fait pression sur le gouvernement camerounais. Ce serai une bêtise si j’omettais de souligner que plus de 1100 personnes ont perdu leurs vies et que ce carnage ne s’est arrêté que sous la pression des revendications dans la rue organisées par le C9.
Pouvez vous nous donner les raisons et les circonstances de la création du C9 ?
Le C9 s’est crée dans les circonstances particulières. Lorsque le 30 janvier 2001 j’avais  collecté le dernier indice me confirmant l’assassinat de mes frères cadets, j’avais entrepris de consulter un certain nombre de personnes afin de déterminer la conduite à tenir. M. Anicet EKANE qui avait précedemment travaillé sur le cas BASSILEKIN était sur ma liste. Au sortir de mon entrevu avec M. EKANE, la décision de créer un comité qui superviserai la revendication était prise. La campagne de mobilisation et d’explication avait duré deux semaines et la première marche de protestation se tenait le dimanche 04 mars 2001.
Sept ans après que ces jeunes gens soient arrêtés par les forces de l'ordre à Bépanda, les familles dont la vôtre n'ont jamais vu les leurs ni retrouvé leurs corps. Qu'est ce que cette situation suscite chez vous ?
Lorsqu’on a perdu des êtres chers on est plongé dans le désespoir. Cette disparition a laissé beaucoup de séquelles, toutes les familles ont été secouées par ce drame. Plus encore nous n’avons pas encore fait le deuil parce que qu’aucune famille ne connaît le lieu de leur exécution et aucun corps  restitué aux familles. Cette situation suscite en moi un sentiment de haine  mais seulement ceci a aussi été un test autant pour moi que pour mes parents qui ont craqués mais n’ont pas rompu, du moins pas encore comme la plupart des autres parents touchés par ce drame. Quant à moi il m’a fallu d’énormes ressources pour mener ce combat qui se terminera le jour où nous connaîtrons la vérité.
Qu'en est t-il de l'état d'esprit des familles des victimes ?
Depuis que je suis installé en Grande Bretagne, j’ai une seule obsession : traduire devant la justice internationale tous les meurtriers du commandement opérationnel. Pour ce faire, nous travaillons sans relâche pour réunir les preuves irréfutables des exactions du C.O. Vous comprenez pourquoi le travail de la réalisatrice est formidable. Il vous suffit d’écouter les différents témoignages pour vous rendre compte de la gravité des faits. C’est ainsi que nous ne pouvons rester indifférent face à cette injustice et des crimes crapuleux qui continuent à être perpétrés en toute impunité par les autorités camerounaises Le pôle d’avocats avec qui nous travaillons sur le dossier se chargera de rendre de tel témoignage recevable par un tribunal neutre. Le C9 prépare actuellement des actions internationales et nous  vous dévoilerons le timing de ces actions en temps opportun.
Un dernier mot
Mon dernier mot sera plutôt un constat. M. BIYA et son gouvernement ne tire pas les leçons du passé. Les derniers évènements au Cameroun sont révélateurs. Je saisis cette occasion pour condamner l’attitude des autorités et souhaiter mes sincères condoléances et surtout beaucoup de courage aux familles frappées par les récents évènements.

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